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 assaï /transmission

1995
assaï / intégrale / version 1995


assaï, le sourire de la Joconde

« Dix ans après sa création, la singularité de cette pièce reste entière. Recréée par les danseurs des carnets bagouet, l’œuvre déconcerte toujours autant, qu’il s’agisse de la forme, de la composition, de ce qu’on nommera les « personnages », de l’univers visuel ou de l’espace sonore, conçu avec le compositeur Pascal Dusapin, dans une communauté de pensée suffisamment rare pour que le musicien y fasse, aujourd’hui encore, référence. Elle fascine par la façon déterminée dont elle semble avancer. Une sorte de surclarté, de plus en plus nettement perceptible chez Bagouet à partir de déserts d’amour. « Nous étions tellement impressionnés par cette part d’inconnu que nous sentions dans l’œuvre, que nous avons d’abord eu peur de ne pas être à la hauteur… » explique Anne Abeille, assistante dans la compagnie qui a remonté la pièce avec Michèle Rust, danseuse présente à la création.

Difficulté à remonter des pièces contemporaines, mais aussi réflexion qui d’emblée, pose la question là où elle doit l’être : « C’est à ce niveau que nous sentons la limite de notre travail, poursuit-elle. Notre regard s’applique à être fidèle à quelque chose d’objectivable. La part de risque, d’ingéniosité du créateur et de ses interprètes, nous reste, d’une certaine manière, inaccessible. C’est seulement au niveau de la tournée que nous avons pu commencer à la travailler, à nous approprier les personnages, à nous donner quelque chose de cette liberté que nous sentons toujours à l’œuvre chez Dominique ».
Si difficile à capter soit-elle, il importe de retenir, pour l’avenir, la matière sur laquelle celle-ci s’est construite. Et c’est précisément ce qu’offrent les nouveaux danseurs d’assaï aidés par les dix créateurs des rôles qui ont pu leur passer ce qui restait inscrit en eux. Les vidéos, réalisées à différents moments de la carrière de la pièce, le travail de notation effectué au cours de la reprise, par Dominique Brun et Simon Hecquet, en précisant le langage, ont aussi considérablement aidé à le reformuler.

Jeux des regards, des sourires et des mains, énergie extraordinairement conduite, la richesse du vocabulaire, son incongruité surprennent comme au premier jour. Elle se joue d’un charme plus immédiat, fondé sur l’image. Référence au cinéma expressionniste allemand cité avec impertinence (docteur démoniaque à la Caligari, créatures artificielles dûment dupliquées, jeunes filles évanescentes). Allusions à Lewis Carroll (danseuses-corolles souriant comme le chat de Cheshire), ou au boulevard du Crime, à ses artistes de foire et à ses acrobates, contrepoint bourgeois. Tout est insensiblement et sourdement miné par une dérive, autrement plus intrigante, qui est celle du langage lui-même, ce sur quoi s’appuie le danseur, et qui insensiblement bascule.

Un jour, à l’Opéra, où il achevait de régler fantasia semplice, Bagouet obtint du maître de ballet qu’il fît taire les danseurs, à seule fin de leur dire, juste avant d’entrer en scène : « Maintenant, respirez, amusez-vous ». « Je crois que je n’ai jamais vu des gens aussi stupéfaits », aimait-il à rappeler.

C’est bien de cette liberté de « s’amuser avec », de cette liberté toujours à conquérir et qui fait toute la différence, que nous parle aujourd’hui encore assaï. Construit rigoureusement, dansé précisément, assaï vient à nous avec ce sourire d’énigme et de silence qui fait les œuvres éternelles. »

chantal aubry, programme du théâtre de la ville, avril 1996
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